ACCOMPAGNEMENT
Après analyse du rôle de la vision, de la définition d’une DV et de ses répercussions, quelle réponse peut-on apporter à une personne en situation de handicap visuel ? Avant de proposer cette réponse, il importe d’effectuer un rappel des schémas d’analyse d’apparition d’une situation de handicap.
Le schéma classique de WOOD décrit le handicap comme une conséquence directe et en quelque sorte linéaire d’une atteinte organique : de la maladie au désavantage. Cette approche permet de mettre en évidence une action possible à chaque maillon de la chaine, du domaine du soin en ce qui concerne l’atteinte pathologique, au domaine de l’aménagement de l’environnement en ce qui concerne le désavantage.
Le concept nord-américain de PPH définit une situation de handicap comme la résultante d’une interaction entre des facteurs inhérents à la personne et des facteurs inhérents à son environnement. Ce concept présente l’intérêt de constituer un modèle positif qui ne place pas la responsabilité du handicap sur la personne. Il permet aussi de définir la notion de participation sociale, c’est-à-dire la possibilité de réalisation de ses habitudes de vie pour la personne. La qualité de cette participation sociale est en effet le résultat de l’interaction entre les caractéristiques d’une personne (dans laquelle va s’inscrire la DV mais aussi la personne dans sa globalité avec ses choix qui lui sont propres) et les caractéristiques de son contexte de vie (personnel mais aussi sociétal).
La réponse s’inscrit dans un accompagnement personnalisé de la personne déficiente visuelle. En effet, le terme d’accompagnement permet de prendre en compte conjointement les facteurs personnels et les facteurs environnementaux de production du handicap. Quels sont ces différents facteurs et en quoi consiste l’accompagnement proposé ?
- Dans le cadre des facteurs personnels, trois grandes dimensions impactent la qualité de la participation sociale :
- Les facteurs identitaires
- Les systèmes organiques
- Les aptitudes
L’accompagnement d’une personne DV au regard de ces facteurs personnels relève d’une démarche de rééducation/réadaptation. En ce qui concerne les personnes en état de cécité clinique cette démarche s’appuie exclusivement sur l’utilisation des autres modalités de prise d’information : ouïe, toucher, goût, odorat, kinesthésie, proprioception et sens des masses. En ce qui concerne les personnes malvoyantes c’est-à-dire conservant une enveloppe de vision (cf. définition de la DV) efficiente, le développement des neurosciences a montré la complexité et la richesse du système visuel et permis de poser les principes de la prise en charge rééducative/réadaptative de la DV qui repose comme l’explique le Pr Christian CORBE, sur trois points :
- Utilisation des champs récepteurs (capteurs d’information) encore intacts pour développer une vision d’accroche sur l’environnement
- Restructuration cognitive, à partir des images dégradées et de la potentialisation multi sensorielle.
- Utilisation de la représentation mentale pour anticiper et préparer la réalisation d’un acte moteur ».
Cette rééducation/réadaptation va donc s’appuyer à la fois sur l’optimisation de la performance visuelle si limitée soit elle (seul champ d’action nécessaire en général en cas d’atteinte visuelle modérée) et celle de l’utilisation des autres modalités de prise d’information au travers de l’acquisition de nouvelles stratégies (nécessitant dans certains cas, le recours à des aides techniques). Il s’agit véritablement d’une restructuration de toute la chaîne neurosensoricognitive visuelle.
De ce fait, elle n’est possible que grâce à la mobilisation d’une équipe pluridisciplinaire orchestrée par un médecin. La mise en place de cette démarche débute par un temps d’évaluation pluridisciplinaire afin d’analyser :
- Les capacités et les limites fonctionnelles de la personne
- La place de l’atteinte visuelle dans sa globalité,
- La volonté de celle-ci à s’investir dans cette démarche rééducative / réadaptative.
- Dans le cade des facteurs environnementaux, trois grands facteurs influencent la qualité de la participation sociale :
- L’environnement: domicile, proches, poste de travail …
- L’environnement: services, structures sociales …
- L’environnement sociétal
L’analyse de cet environnement permet de mettre en évidence l’identification d’éléments facilitateurs et d’obstacles. L’accompagnement d’une personne DV peut être actif sur cet environnement en optimisant les éléments facilitateurs et en réduisant les obstacles, notamment en agissant au niveau de l’environnement personnel (ex : adaptation du domicile et sensibilisation des aidants de proximité, (cf. prestations) et ce, de façon personnalisée. En ce qui concerne l’environnement communautaire, l’action possible se situera davantage à l’échelon d’un service et sur un mode global (ex : amélioration de l’accessibilité en ville, (cf. prestations en locomotion). Quant à ce qui concerne l’environnement sociétal, nous avons fortement insisté sur l’importance de la méconnaissance sociétale du handicap visuel comme facteur aggravant des répercussions d’une atteinte visuelle(cf. vie sociale) et l’intervention à cet échelon dépasse alors le cadre d’un service.
L’accompagnement optimal d’une personne DV doit nécessairement prendre en compte et agir dans la mesure du possible sur ces deux catégories de facteurs.
C’est en effet, de l’analyse de ces différents facteurs que va pouvoir se mettre en place un projet d’accompagnement personnalisé. Afin de mener à son terme l’intégration sociale, aboutissement final d’une démarche de prise en charge du handicap, cette analyse permettra aussi de déterminer si une articulation entre l’acquisition de techniques réadaptatives et la mise en place de dispositifs de compensation s’avère nécessaire. Il nous semble que cet accompagnement dans le cadre d’un SAMASH DV (cf. le SAMSAH ARRADV) permet d’appréhender et d’agir de la façon la plus pertinente possible sur ces différents facteurs.