PRESTATIONS DU PSYCHOMOTRICIEN 


Le temps d’évaluation 

Le bilan psychomoteur a pour objectif de faire un état des lieux  des fonctions psychomotrices de la personne et de ses capacités d’adaptation.

Dans l’analyse de ces fonctions psychomotrices :

  • Les points forts pourront être utilisés et/ou développés, afin de faire face, compenser ou  pallier  la déficience visuelle.
  • Les points faibles et les dysfonctionnements, soit conséquence directe de la déficience visuelle, soit relevant  d’autres causes que celle-ci devront être dépistés et pris en compte, car  pouvant majorer la situation de handicap liée à la déficience visuelle.

Les fonctions psychomotrices évaluées plus particulièrement dans le champ de la déficience visuelle sont les suivantes :

  • L’équilibre.
  • Les coordinations et l’aisance corporelle.
  • Le schéma corporel.
  • L’adaptation à l’espace et au temps. 
  • La latéralité.
  • L’anticipation et le projet moteur
  • Les capacités d’orientation.
  • La représentation mentale (incluant la représentation spatiale).
  • Le sens proprioceptif et le sens des masses.
  • Le tonus musculaire en relation avec les émotions et les états psychiques.
  • L’instabilité – Inhibition – relâchement.
  • Les capacités de compréhension et la motivation.

La bonne régulation de ces fonctions psychomotrices est  nécessaire, voire  indispensable à  l’autonomie et l’adaptation de la personne déficiente visuelle  à son environnement.

Afin de mieux appréhender cette analyse, nous allons prendre pour exemple la notion d’équilibre en expliquant pourquoi l’équilibre  est particulièrement indispensable à la personne déficiente visuelle. En effet, une personne déficiente visuelle  peut être facilement déséquilibrée par un obstacle non perçu ou mal identifié, d’où un risque de chute  majoré. Aussi la personne déficiente visuelle  aura-t-elle  besoin de mieux appréhender  le terrain avec le pied, afin d’obtenir des informations sur la nature de ce terrain ce que la vue ne lui permet plus. Or ce mode d’appréhension du terrain n’est possible qu’avec un bon équilibre. 

Il est intéressant de développer cette analyse concernant l’équilibre dans le domaine du public âgé, majoritairement touché par la déficience visuelle. En effet, nous savons que l’équilibre est souvent de moins bonne qualité chez la personne âgée. De ce fait, dans ce domaine, âge et déficience visuelle constituent une combinaison « péjorative » s’articulant en une boucle rétroactive majorant encore le risque de chute.

Enfin, il importante de noter que parmi les différentes fonctions psychomotrices évaluées, certaines sont spécifiques à la déficience visuelle, à savoir :

-          La représentation mentale

-          L’aisance corporelle

-          L’organisation spatiale

Fin d’évaluation 

Le bilan psychomoteur va permettre de déterminer un score de psychomotricité noté sur 100 orientant  vers la nécessité ou pas d’une prise en charge. Deux  options sont possibles :

  • Pas d’indication de réadaptation:
    • La personne n’en a pas: le sore au bilan est compris entre 90 et 100 ;
    • La personne ne souhaite pas s’investir;
    • La personne présente des difficultés trop importantes  qui relèvent du domaine d’un autre professionnel. (kinésithérapeute, neurologue, psychologue, gériatre…). La prise en charge en psychomotricité relève de prestations  qui ne sont pas exclusivement liées  à la déficience visuelle.

Exemple : La personne présente des besoins en psychomotricité qui nécessiteraient une vingtaine  de séances afin d’intervenir sur  une fonction psychomotrice comme un trouble du schéma corporel  avant de pouvoir commencer un travail en rapport avec son atteinte visuelle. 

  • Indication d’une réadaptation 

Elle est proposée au regard du bilan psychomoteur et on peut considérer qu’au dessous d’un score de 70, une prise en charge s’avère nécessaire. Pour un score compris entre 70 et 80, un suivi ou une surveillance peuvent être utiles et seront effectués au regard du plan global de prise en charge propose dans les autres domaines.

Dans tous les cas, il faudra  prendre en compte l’investissement de la personne à aborder ses difficultés.

Conseils

Qu’une indication de réadaptation soit posée ou pas, la personne aura reçu des conseils pendant cette phase. En effet :

  • La passation du bilan consistant en une mise en pratique, la personne aura reçu un retour sur son fonctionnement psychomoteur.  Il lui sera restitué ce qui est pertinent d’utiliser parmi ses points forts, ce qu’elle doit développer et éventuellement ce qu’elle doit éviter de faire ou doit modifier.
  • La pratique d’une activité structurante ayant des répercussions positives sur la situation de handicap engendrée par sa déficience visuelle, son insertion sociale et sa dynamique comportementale lui sera souvent suggérée.
  • Quelques exercices de respiration ou d’équilibre lui seront aussi souvent proposés.
  • Enfin, en ce qui concerne les personnes ayant de  bonnes possibilités corporelles, leur attention sera attirée sur le fait d’avoir une activité physique afin d’entretenir leurs compétences.

Notion d’urgence ou plutôt de priorité: elle intervient quand la personne présente une désorganisation psychomotrice importante ou un grave trouble de l’équilibre, aggravant notamment le  risque de chute. Elle se pose aussi quand la perte de vision étant  très rapide, les capacités d’adaptation se trouvent rapidement dépassées, mais ce,  si la personne n’est  pas trop « envahie psychologiquement ».

Plan de prise en charge ou d’accompagnement 

Dans ce plan, seront déterminés les éléments suivants :

  • Le contenu et la durée de la prise en charge qui vont dépendre des difficultés identifiées, de la détermination de la personne à les aborder ainsi que  de son  projet global (déplacements extérieurs ou non) :

5-12 séances :

  • Pour les personnes qui ont juste besoin d’une stimulation  en équilibre afin de les inciter à faire seules chez elles ;
  • Pour les personnes qui veulent quelques outils en relaxation afin de gérer certaines situations difficiles ;
  • Pour les personnes qui ont peu de difficulté  mais qui ont besoin d’une reprise de confiance dans leurs capacités ou d’optimiser encore davantage leurs capacités et leur autonomie ;
  • Pour les personnes qui ont un niveau correct mais ont besoin de prendre conscience de leurs capacités et de savoir quand les utiliser et/ou d’être sensibilisées à des techniques leur permettant d’affronter une aggravation de leur atteinte visuelle. 

12-24 séances :

  • Pour les personnes  qui ont des difficultés multiples et ont besoin de modifier certains dysfonctionnements qui sont, soit inhérents à leur développement psychomoteur,  soit inhérents à la déficience visuelle notamment renforcer leur équilibre par exemple ; 
  • Pour les personnes qui ont besoin d’acquérir des stratégies de compensation en apprenant à utiliser  toute l’information sensorielle afin de pallier la déficience visuelle. 

24 séances et plus :

Pour les personnes qui ont des difficultés majeures.

Ces indications demeurent schématiques et plus la personne progressera, plus des stratégies complexes pourront être développées.

  • Le lieu : domicile ou service

ü  En règle générale, la prise en charge est effectuée dans le service pour les raisons suivantes :

  • Le service constitue un lieu de réadaptation (impliquant la notion de cadre):

-   Le service représente un espace professionnel étranger à la personne, lui permettant d’apprendre à structurer l’espace de façon beaucoup plus pertinente qu’au domicile, sans interférence avec l’environnement (pas d’intrusion de proches,  pas de téléphone par exemple) ;

-   La salle réservée aux séances de  psychomotricité permet d’avoir le matériel technique nécessaire à la réalisation de certaines séances ;

-       Les séances peuvent plus facilement s’effectuer  dans un espace temps bien identifié.

  • Seul, le service offre la possibilité d’une prise en charge en groupe.

La prise en charge  au domicile constitue la solution de recours quand elle ne peut être effectuée dans le service en raison d’une problématique personnelle de l’usager mais surtout pour des problèmes matériels liés au transport.

Par ailleurs, quand la personne a progressé, il peut être pertinent d’effectuer des séances en extérieur afin de travailler sur la gestion du stress et de l’angoisse, liée aux déplacements. 

  • Le mode : individuel ou en groupe

Les séances s’effectuent en groupe, (dans l’idéal de 7 à 8 personnes) du fait de la dynamique qui s’instaure dans un groupe permettant d’activer ou réactiver le lien social, de provoquer de l’émulation même chez des personnes d’âge différent , sans négliger enfin, l’aspect économique permettant de réadapter plusieurs personnes en même temps. A ce jour, le nombre de personnes ne peut pas excéder 3 voire 4 personnes en raison de la dimension trop exigüe de la pièce dévolue à ces séances. 

Cependant, une prise en charge individuelle peut être indiquée dans certaines situations : 

  • Si la personne refuse la prise en charge en groupe ;
  • l’ampleur des difficultés ou leur particularité et/ou l’état psychologique font qu’il est difficile de mettre en place un travail en groupe ;
  • Ou bien au contraire, si la personne présente des difficultés légères, ou ciblées dans un seul domaine, ou encore, est en capacité d’optimiser ses possibilités de façon supérieure à la norme.
  • Le rythme : le plus souvent, les séances d’effectueront sur un mode hebdomadaire.

Le temps de réadaptation

  Trois grands axes s’articulent de manière coordonnée et inter-  dépendante

  Ces trois axes sont quasiment toujours abordés et ce en: de la relaxation à l’orientation, en passant par l’équilibre. Schématiquement : 

  • La relaxation

Prendre en compte la relaxation consiste à travailler sur :

    • L’écoute et la connaissance de soi
    • L’intégration de son schéma corporel
    • La diminution des tensions et du stress.
    • L’assouplissement des extenseurs, ce en lien avec l’équilibre 
  • L’équilibre 

Améliorer son équilibre demande de travailler sur :

    • Toutes les articulations.
    • La prise de conscience de l’axe et des transferts de poids.
    • La gestion des émotions (qui bénéficie nécessairement de l’apport de la relaxation et de la respiration).
  • L’orientation et organisation spatiale

 Optimiser son orientation et son organisation spatiale demande de travailler sur :

    • L’utilisation et développement des autres sens:La transposition de toute l’information sensorielle (tactile, auditive, kinesthésique mais aussi visuelle) en image mentale. Apprendre à se déplacer sans les yeux.
      • Le sens du mouvement.
      • Le toucher.
      • Le sens des masses.
    • La transposition de toute l’information sensorielle (tactile, auditive, kinesthésique mais aussi visuelle) en image mentale. Apprendre à se déplacer sans les yeux.
    • L'utilisation et le développement de la représentation mentale.
    • La gestion des émotions (qui bénéficie nécessairement de l’apport de la relaxation, de la respiration et de l’équilibre).
    • Les techniques de localisation spatiale
    • La verbalisation de l’espace

 Ces trois axes de la réadaptation sont interdépendants: 

Quand il n’y a pas de détente physique et mentale, il n’y a pas d’équilibre. Sans équilibre l’orientation est problématique. Les capacités d’orientation sont conditionnées par la connaissance du corps…. 

L’entrainement est individualisé:

Les techniques apprises doivent être pratiquées régulièrement chez soi. La  psychomotricité est une forme de programmation neuronale dont le but, à travers l’apprentissage est de déclencher des automatismes opérationnels.

La transversalité 

Interne 

Avec la rééducatrice en locomotion

Le psychomotricien effectue un travail de base sans lequel l’instructeur en locomotion ne peut fonctionner. En effet, il aborde avec la personne les pré-requis à la locomotion concernant notamment  la coordination, l’équilibre et l’orientation spatiale.

Dans un deuxième temps, après acquisition des bases en locomotion, il peut faire progresser la personne dans la représentation mentale, des techniques plus poussées d’orientation spatiale, une meilleure maitrise des situations de stress, davantage de réflexion sur sa prise d’information et sa manière de réagir. 

Avec l’ergothérapeute

Les deux professionnels abordent la motricité, mais du fait de la collaboration et de la coopération interdisciplinaire,  les aspects relatifs à la perception, et à l’orientation de l’espace proche (espace manuel), ainsi que les praxies manuelles constructives sont abordés en ergothérapie. 

Avec le psychologue 

Le travail sur la sécurité interne et la notion d’acquisitions de techniques effectuées en psychomotricité peuvent permettre au psychologue d’utiliser des éléments concrets afin de faire avancer la personne dans la prise de conscience de ses capacités.

Dans l’autre sens, le psychologue peut attirer l’attention du psychomotricien sur des éléments psychologiques comme par exemple un comportement anxieux, agressif… susceptibles d’interférer avec sa prise en charge. 

Avec l’assistant de service social

Un travail sur la recherche de clubs de sport ou de structures de loisir susceptibles de recevoir des personnes déficientes visuelles peut être travaillé en concertation avec les deux professionnels.

Externe 

Le psychomotricien peut être amené à travailler avec des partenaires extérieurs qui vont venir s’inscrire tant en complémentarité qu’en sortie de sa prise en charge :

  • Certains professionnels de santé comme :
    • Les kinésithérapeutes: 

L'orientation vers ce professionnel est proposée:

      • Soit quand la personne présente une atteinte orthopédique  et/ou une motricité très limitée, ces altérations étant  majorées par la déficience visuelle. Le psychomotricien peut parfois être amené à effectuer une réadaptation en lien avec l’atteinte visuelle dans un deuxième temps.
      • Soit quand la personne présente une problématique non en lien avec l’atteinte visuelle.

Le choix  de ce professionnel relève de plusieurs facteurs qui se conjuguent entre eux à savoir :

      •      La difficulté de trouver un psychomotricien intervenant en libéral et de surcroit l’absence de prise en charge dans le cadre de l’assurance maladie de cette catégorie de professionnel ;         
      •          La notion qu’un kinésithérapeute est susceptible d’intervenir sur des  problématiques d’équilibre, ce que l’on retrouve notamment fréquemment, chez la personne âgée. 

  • D’autres professionnels de santé qui touchent à des problématiques interférant avec le champ de la psychomotricité comme neurologue, neuropsychologue, podologue, ostéopathe, orthopédiste … L’orientation déde l’altération mise en évidence lors du bilan. Elle sera parfois malencontreusement  aussi limitée par l’existence ou pas du professionnel le plus pertinent à la réponse de la problématique de la personne.
  • Des structures de sport :

En effet, pratiquer un sport est tout à fait pertinent pour une personne déficiente visuelle. Certains sports comme la gymnastique douce, la  relaxation, la  danse, le  yoga, le tai chi …) sont tout à fait indiqués notamment à la sortie du service. Mais dans la pratique de ces différents sports, il importe que l’enseignant ait tout au moins un minimum de sensibilisation au handicap visuel car toute explication doit passer par la verbalisation.

Le travail de recherche de ce type de structure demande beaucoup de temps et se met en place progressivement par un travail conjoint avec l’assistante sociale du service et au fur et à mesure des contacts établis. 

  • Des ateliers d’équilibre

Ces ateliers sont mis en place par des organismes d’horizons  différents (association, centre de prévention en gérontologie, mutuelles…).  L’orientation vers de tels ateliers peut être tout à fait pertinente en sortie de service, d’autant que la personne en aura saisi à ce moment là tout l’intérêt et l’opportunité.

La sortie du service

Elle est actuellement systématisée au travers d’un entretien de fin de prise en charge. L’objectif est de permettre à la personne au travers de ses acquis de faire face à de nouvelles situations même après sa sortie du service.

Une fiche d’exercices correspondant à ceux effectués pendant la prise en charge, et à son niveau de possibilité lui est remise avec les conseils de continuer à effectuer ces différents exercices et ce, de façon régulière ainsi que de pratiquer la  marche.