PRESTATIONS DU PSYCHOLOGUE

  

Le temps d’évaluation 

En préambule, il est important et intéressant de noter que la rencontre de la personne avec le psychologue s’inscrit institutionnellement. En effet, par cette démarche, le SAMSAH met en évidence son désir de considérer l’usager dans sa singularité et sa globalité. Ainsi posé à l’usager, ce cadre permet de provoquer une rencontre qui n’aurait peut-être pas eu lieu. La demande n’émane pas directement de l’usager, mais on lui offre la possibilité de se saisir de cet espace de parole. Et la pratique au quotidien  fait dire qu’il le saisit en majorité.

Cette évaluation  systématique est pertinente, importante et nécessaire  car elle permet de :

  • Déterminer :
    • L’existence d’un envahissement psychologique par le vécu éde la déficience visuelle et l’importance de cet envahissement;
    • La présence ou pas de troubles psychiques associé;
    • La possibilité d’une « problématique » cognitive.
  • Replacer l'atteinte visuelle dans l'histoire de vie de la personne (impact de la DV dans la trajectoire de vie)
  • Projeter la personne dans une dynamique de vie.

L’écoute du clinicien doit permettre à la personne d’envisager un « possible » de vie dans « l’ici et maintenant » avec son handicap. Le soutien psychologique dans cette première rencontre fait état de l’ « être sujet » acteur de sa vie (différent de la notion de subir) sans occulter, ni nier l’atteinte visuelle.

Fin d’évaluation

Plusieurs possibilités et différentes propositions peuvent être envisagées :

  • Pas d’accompagnement psychologique. La déficience visuelle est intégrée et le sujet a maintenu une dynamique de vie positive.
  • Proposition d’un accompagnement psychologique, librement accepté, dans l’objectif de soutenir la prise en charge réadaptative et/ou de s’appuyer sur les problématiques évoquées par l’usager.
  • Et/ou proposition de rencontrer la personne de proximité de vie.
  • Et/ou proposition d’intégration dans un groupe de parole.
  • Et/ou orientation vers un soutien thérapeutique.

Dans tous les cas où la personne va intégrer une phase d’accompagnement à visée réadaptative sans a priori de nécessité d’un soutien psychologique, il lui est verbalisé la disponibilité pour un éventuel soutien si elle  le désire. Ainsi, elle peut à tout moment le solliciter. Les membres de l’équipe peuvent aussi alerter le psychologue sur les difficultés psychologiques de certains usagers. Enfin, le psychologue peut être amené à attirer l’attention des professionnels de l’équipe sur la fragilité d’un usager et  leur demander d’être vigilants.

Enfin, au cas où la personne va intégrer une phase d’accompagnement à visée réadaptative, il lui est proposé d’intégrer un groupe de parole pendant le délai d’attente. En effet, le premier contact avec le service permet le plus souvent à la personne de se poser dans le cadre d’une illusion anticipatrice du possible ; car  elle arrive souvent en position de « fracture ». Le groupe  de parole permet de travailler cette illusion. Il  permet que le possible ne s’effondre pas. La personne  entre dans du réel car elle va côtoyer ainsi  des personnes  qui ont déjà entamé leur  parcours. Cet élément concret  est porteur de pulsion de vie.

Notion d’urgence : Elle s’appuie sur les éléments suivants :

  • Une notion d’isolement très importante
  • Une incapacité à faire face aux actes quotidiens
  • Un symptôme dépressif très prégnant

Par ailleurs un accompagnement psychologique peut s’avérer nécessaire en amont des acquisitions réadaptatives en cas de symptôme dépressif  tel qu’il parasite le plan sensoriel, voire cognitif et compromet l’acquisition de techniques.

Plan de prise en charge ou d’accompagnement 

La prise en charge  va se déterminer sur l’analyse d’une grille d’évaluation. Dans cette grille sont analysés les critères importants et/ou spécifiques à la déficience visuelle :

  • Capacité à être seul : Comment vivre avec quelqu'un  et  pas de par quelqu'un
  • Sécurité interne : La notion de sécurité est très importante  dans le champ de la déficience visuelle, notamment lorsque l’on doit déambuler avec une canne.
  • Valorisation de l’image de soi qui est spécifique à la déficience visuelle car il y a fragilisation de sa propre image.
  • Capacité d’adaptation qui va demander au cours des processus d’adaptation d’avoir capacité à changer sa façon d’être dans la vie de tous les jours
  • Confiance en soi  qui est fortement «  ébranlée »  par la perte de la vision.
  • Rupture de l’isolement : toute situation de handicap favorise le vécu de l’isolement
  • Communication sociale et familiale : la déficience visuelle a souvent  comme conséquence un parasitage de cette communication. En effet, il y a nécessité d’adaptation réciproque, entre la personne atteinte et son environnement face à la déficience visuelle (réorganisation du domicile, intégration de la déficience visuelle par l’environnement…). Car, la déficience visuelle  ne  pouvant être visualisée  de façon concrète, il y a très souvent une suspicion de fabulation de la part de l’entourage qui n’a pas l’information suffisante pour comprendre l’atteinte visuelle ainsi que ses répercussions.
  • Dynamique de vie personnelle,  propre à tout  handicap. C’est un élément important au regard du  projet de vie.
  • Dépassement de l’état dépressif : conséquence de la perte et de l’isolement social, c’est un élément important qui conditionne l’élan vital. 

La durée proposée va dépendre de l’intégration du handicap et des difficultés de vie.

Elle pourra être courte (6mois), moyenne (1 an), longue (au-delà).

L’accompagnement est généralement mensuel ; il reste cependant adapté aux besoins de la personne prise en charge.

Le temps de réadaptation

Le soutien psychologique utilisera l’entretien régulier et/ou l’intervention en groupe de paroles (espaces, d’échanges, d’information et de réflexion) dans un rythme mensuel.

Ces deux outils, face à la souffrance qu’engendre le vécu de l’atteinte importante de la vision, doivent permettent :

  • Une écoute « enveloppante », dans une empathie partielle avec la personne afin d’être dans une fonction contenante et accueillir ainsi le mal être.
  • Un espace de rencontre avec d’autres personnes déficientes visuelles afin de favoriser les échanges, la rupture de l’isolement, la reconnaissance de soi en tant que personne handicapée
  • Une aide à l’intégration du handicap différente de l’acceptation du handicap (prise en compte de l’individu et du temps nécessaire)
  • Un  dépassement du déni de la déficience visuelle face au regard de l’autre et de soi pour un mieux- être  dans la vie journalière.
  • Un accompagnement du travail de deuil, de perte, se séparer d’hier pour vivre avec ce qui est aujourd’hui (vivre, agir, voir autrement)
  • Une aide à l’appropriation des processus d’adaptation nécessaire car ces derniers peuvent ramener le vécu difficile du handicap.
  • Une aide à retrouver ou à consolider la confiance en soi.
  • Une aide à retrouver une qualité de communication avec le relationnel de proximité
  • Un retour à une dynamique de vie personnelle et/ou professionnelle
  • La possibilité à la pulsion de vie de prendre place face au symptôme  réactionnel dépressif engendré par la perte de vision. 

Groupe de parole

Le groupe de parole constitue un moment de partage entre les usagers où ils  pourront échanger leurs expériences face à la déficience visuelle. C’est aussi une façon de permettre au sujet de ne plus se sentir seul face à ce handicap et de pouvoir se servir de l’expérience de chacun pour avancer lui-même dans son parcours de vie. Cette mise en groupe favorise, ou réinstaure pour certains usagers, la richesse du lien social en rompant leur isolement.

En effet, il est  intéressant de faire circuler dans cet espace de groupe des connaissances et des informations pratiques sur ce qui a été mis en place pour pouvoir, malgré la déficience visuelle, maintenir et/ou continuer à entreprendre des activités.

Les groupes de parole et d’information concernent les 4 thèmes suivants :

  • Loisirs : activités sportives adaptées, autres activités adaptées.
  • Maintien intellectuel: atelier mémoire, bibliothèque sonore, sorties culturelles, associations...
  • Droit et réseau : informer les personnes sur leurs droits, les financements, les CCAS, les CLICS…
  • Insertion professionnelle et activités bénévoles

La composition du groupe s’appuie à la fois sur la personnalité des personnes et sur l’intégration homogène dans le groupe, de personnes d’âge différent, ce qui  favorise la richesse des échanges et la dynamique de groupe. Ainsi, le groupe de parole présente l’avantage de s’appuyer sur la notion d’intergénérationnel, toujours présente et non contradictoire avec la notion d’homogénéité du groupe. De surcroit, le maintien du lien social à la sortie du service est susceptible de s’appuyer sur des échanges téléphoniques élaborés à l’occasion de ces groupes.

Rencontre possible avec les proches des usagers (enfants, parents…)

Le vécu de la déficience visuelle ébranle souvent  l’équilibre du couple et/ou la relation avec les proches où chacun doit retrouver sa place, n’être ni dans le « trop » ou dans le « pas assez ». Ces difficultés, sont souvent exprimées par les usagers, qu’il s’agisse de sentiment d’incompréhension, de minimisation ou à l’inverse de trop grande présence, de désir de reconnaissance,  de  mise à l’écart pour décider de tel et tel projet…

La rencontre de l’entourage familial, en accord avec l’usager, révèle aussi le désarroi du conjoint ou du proche face au handicap. Comment se positionner, quel avenir est encore possible, comment affronter la dépression de son épouse/époux (proche), la lassitude d’être toujours sollicité, avoir le sentiment de ne pas pouvoir tout assumer…. 

La transversalité

Interne

  • Avec l’assistant de service social

Une prise en charge psychologique, c’est s’intéresser à la subjectivité du sujet, mais sans occulter la réalité sociale dans laquelle il se trouve. Les réponses pragmatiques que peut apporter l’assistante sociale sont parfois nécessaires, avant d’envisager une prise en charge globale par le  service. Exemple : comment être disponible psychologiquement pour investir une prise en charge réadaptative quand les besoins élémentaires pour vivre  ne sont pas réunis.

De même, la collaboration étroite entre l’assistant de service social et le psychologue permet de  favoriser la rupture de l’isolement de l’usager. Exemple clinique : Mme B est dépendante de son mari concernant tous ses déplacements à l’extérieur, ce qui provoque  des conflits dans le couple. Au fur et à mesure que le temps passe, elle abandonne les activités qu’elle pratiquait et se retrouve très vite isolée. Durant la  rencontre avec le psychologue, elle fait part de son désir de suivre des cours d’informatique mais ne veut pas solliciter son mari pour éviter tout conflit. Le montage d’un dossier d’une PCH transport réalisé par l’assistant de service social, permet à Mme B de suivre des cours d’informatique et donc de pallier l’ennui, de pouvoir réinstaurer du lien social par le biais des rencontres qu’elle fait dans cette association et d’apaiser la tension qui régnait dans son couple.

Ainsi, les réponses pragmatiques que peut apporter  l’assistant de service social  soutiennent  la prise en charge psychologique.

  • Avec les réadaptateurs

Le travail que mènent les réadaptateurs (orthoptiste, ergothérapeute instructeur en locomotion)  rentre en résonnance avec la prise en charge psychologique, notamment concernant l’intégration de la déficience visuelle de l’usager. Pour pouvoir compenser la déficience visuelle en utilisant les autres sens il faut que l’usager soit prêt psychologiquement. Ceci implique qu’il ait  suffisamment  intégré sa déficience visuelle.  Aussi, il y a tout un travail de lien entre ces deux professionnels car, dans ces deux espaces différents, sont travaillés des problématiques comme la question de l’autonomie et l’intégration du handicap.

Exemple clinique :

M. D qui a maintenu une activité professionnelle, a des difficultés en termes d’organisation et de temps. Ceci explique l’accumulation d’une pile de dossiers, qu’il n’a pas eu encore le temps de traiter et qui remet en cause son efficacité au travail. Partant de ce constat, l’ergothérapeute conseille à l’usager de repenser l’espace de son bureau. Malgré son approbation, il semble avoir une certaine réticence.

La psychologue va pouvoir reprendre avec l’usager ces éléments dans son  espace.  L’aménagement de son lieu de travail, lui renvoie le fait qu’il ne peut plus mener son activité professionnelle comme avant. Changer de bureau porte toute une symbolique qui doit être élaborée psychiquement.

  • Avec le psychomotricien

La psychomotricité, met en avant le lien étroit entre l’image du corps et l’image de soi. Les techniques de relaxation que ce professionnel apporte, aux usagers, peuvent se conjuguer avec une prise en charge psychologique.

Externe 

Le psychologue doit développer un réseau avec ses confrères comme psychologues, psychiatres mais aussi services de psychiatrie et Centres  Médico Psychologique

Il peut leur adresser l’usager dans différents cas :

  • Si celui-ci ne nécessite qu’une prise en charge psychologique
  • Si l’usager relève d’un soutien thérapeutique.

La Sortie du service 

Le groupe de parole est un outil important dans la préparation de la sortie (possibilité de lien avec d’autres usagers).

En dehors de la nécessité d’un soutien thérapeutique, la sortie se travaille avec le professionnel du social.  

Pour le psychologue, le fait d’être dans une structure ambulatoire de proximité permet :

  • D’être dans un projet de vie immédiat, dans la réalité de vie de tous les jours.
  • De laisser  plus de latitude à l’état de sujet de la personne, d’accompagner la personne à son rythme, de bien prendre en compte son vécu.
  • D’être davantage sur l’autonomie (ce mode d’accompagnement va mieux aider la personne à retrouver son autonomie propre, car elle a le temps de se poser et de se retrouver).
  • De favoriser l'autonomie de la personne au travers des dépalcements, du fait de leur venue dans le service.

A contrario, l’éloignement géographique de certains usagers, l’absence de prise en charge des transports oblige à effectuer certains suivis au travers d’entretiens téléphoniques, posant le problème de l’absence de cadre et des conditions matérielles de cet entretien que le professionnel ne peut vérifier (usager seul, au calme et réceptif). Mais  ce suivi est préférable dans le cas d’une impossibilité de soutien dans le service.