DEFINITION DE LA DEFICIENCE VISUELLE 

Définie par le dictionnaire comme une simple insuffisance, toute déficience humaine s’inscrit désormais dans la séquence de WOOD adoptée par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) et plus récemment dans le concept nord-américain  de Processus de Production du Handicap (PPH)  qui met en exergue la notion de participation sociale dont la situation de handicap n’est que l’antagoniste.

Or, eu égard à :

  • D’une part le rôle complexe et polymorphe de la vision ;

  • D’autre part l’interaction constante de la  vision avec l’environnement physique source de variabilité ;

La définition de la déficience visuelle (DV) se singularise de la seule atteinte organo-fonctionnelle. En effet, la DV désigne  l’état fonctionnel d’une personne qui présente une acuité visuelle réduite, non améliorable par quelque thérapeutique ou correction optique, en relation avec une atteinte pathologique de l’œil ou des voies optiques.

Cependant à ce jour,la définition de la DV se réfère toujours au seul marqueur uniformément répandu, à savoir la mesure de l’acuité visuelle. 

Sur un plan pratique, Il importe de noter que ce chiffre d’acuité visuelle de loin doit tenir compte de la meilleure correction optique nécessaire à son optimisation, ce,  à l’exclusion de tout système optique grossissant et d’ajouter de surcroit que :

  • Cette mesure est effectuée dans des conditions de contraste maximum, ce qui ne correspond pas aux situations de vie les plus courantes ;

  • Les échelles d’acuité classique, utilisées le plus fréquemment disposent de peu d’optotypes dans les faibles acuités, limitant de fait la possibilité de mesure exhaustive de celles-ci ;

  • Afin de « chiffrer » l’atteinte visuelle dans l’objectif de déterminer la sévérité de cette atteinte, seul doit être retenu un chiffre d’acuité sans position « vicieuse » de la tête ou des yeux.

  • Notamment, en ce qui concerne les barèmes faisant référence à la vision de près, le chiffre retenu doit correspondre à une lecture fluide avec un éclairage précis, ce qui n’est pas toujours le cas.

Enfin, il demeure important d’avoir conscience que la mesure de l’acuité visuelle constitue une donnée tout à fait subjective (car ne relevant pas exclusivement de l’examen du professionnel, mais demandant nécessairement la participation de la personne).

 La classification la plus utilisée de la Déficience Visuelle est celle proposée l’OMS, reprise dans la Classification Internationale des ). Cette classification  a l’avantage de prendre en compte au-delà de l’acuité visuelle un autre paramètre important, à savoir la réduction du champ visuel (CV). Dans celle-ci, l' décrit cinq stades de déficience visuelle :

  • Catégorie 5 ou  cécité absolue qui  correspond à l’absence de perception de la lumière.

  • Catégorie 4 ou déficience visuelle presque totale, ou cécité sévère, qui  est définie par  une acuité visuelle inférieure à 1/50

  • Catégorie 3 ou déficience visuelle profonde qui correspond à une acuité visuelle inférieure à 1/20 et supérieure à 1/50 ou un champ visuel inférieur à 10 degrés.

  • Catégorie 2 ou  déficience visuelle sévère  qui correspond à une acuité visuelle inférieure à 1/10 et supérieure à 1/20.

  • Catégorie 1 ou déficience  visuelle moyenne qui  correspond à une acuité visuelle inférieure à 3/10 et supérieure à 1/10.

En ce qui concerne l’acuité visuelle, les catégories 3, 4 et 5 se situent au- dessous du seuil de définition de la cécité légale, (acuité visuelle inférieure à 1/20 pour le meilleur œil). En ce qui concerne le CV, est prise en compte la réduction du CV binoculaire à savoir, CV inférieur à 10° correspondant à la catégorie 3 de l’OMS. La CIM actuelle, CIM 10, utilise les mots de “basse vision” pour les catégories 1, 2 et 3 des déficiences visuelles.

Dans la définition donnée par l’OMS, il faut pointer que l’atteinte du  CV seul équivaut à une cécité légale. Cette référence à une atteinte du CV sans tenir compte de l’acuité visuelle se retrouve d’ailleurs dans le Guide-barème pour l’évaluation des déficiences et incapacités des personnes handicapées, (instauré par le décret n° 93-1216 du 4 novembre 1993, transformé en annexe 2-4 de la partie réglementaire du code de l’action sociale et des familles par le décret n° 2004-1136 du 21 octobre 2004   et modifié par le décret n° 2007-1574 du 6 novembre 2007) utilisé par les MDPH qui indique un taux d’incapacité compris entre 70 et 80% lorsque le CV est inférieur à 10°.  Le champ visuel binoculaire est apprécié à la coupole de Goldman avec le test III/4 sans dissociation des deux yeux.

Mais afin de donner une définition exhaustive de la  DV, il  conviendrait de prendre en compte l’ensemble des paramètres qui constituent l’enveloppe de vision à savoir : acuité visuelle de loin et de près, champ visuel, vision des contrastes, vision des couleurs, mesure de la sensibilité à l’éblouissement, adaptation aux changements rapides de luminance vision binoculaire (dont certains sont très souvent altérés en cas d’atteinte visuelle sévère) ce qui est difficilement réalisable en pratique quotidienne. 

Ainsi, du point de vue du réadaptateur, dans la mesure où la DV spontanément variable est déjà corrélée aux notions de subjectivité et d’environnement, elle peut être définie comme un ensemble de paramètres (constituant l’enveloppe de vision) exclusivement individuels altérant pour chaque activité de la vie quotidienne, l’autonomie et donc la participation. Cette approche fonctionnelle de définition de la DV a d’ailleurs été proposée  en 2003 par l’Union Européenne des aveugles :« Une personne malvoyante est une personne dont la déficience visuelle entraîne une incapacité dans l’exécution d’une ou plusieurs activités suivantes : lecture et écriture, appréhension de l’espace et des déplacements, activités de la vie quotidienne, communication, poursuite d’une activité exigeant le maintien prolongé de l’attention visuelle ». Ainsi, dans l’impossibilité d’une détermination  facile des différents paramètres de l’enveloppe visuelle, cette approche fait passer insensiblement  de la définition de la DV (par la mesure de l’acuité visuelle) à l’analyse d’une situation de handicap. Or, en pratique, la prise en compte de cette approche demande du temps et ne peut relever que de l’analyse d’une équipe pluridisciplinaire spécialisée dans la DV. C’est pourquoi, il demeure indispensable afin de permettre l’accès aux droits et aux dispositifs deprise en charge que cette définition continue à s’appuyer sur des donnéeschiffrées facilement accessibles et compréhensibles,l’analyse de la situation de handicap étant ensuite poursuivie par une équipe pluridisciplinaire. 

Cependant en raison du manque d’équipes pluridisciplinaires spécialisées, et dans l’objectif d’une meilleure approche de la notion de handicap visuel, nous avons réalisé un questionnaire pratique, très concis  relevant d’un travail d’équipe destiné à identifier les difficultés de vécu d’une atteinte visuelle sévère. Ce questionnaire ne pourra être instruit qu’à partir du moment où l’atteinte visuelle aura été préalablement chiffrée et corrélée à une atteinte pathologique non améliorable par quelque thérapeutique ou correction optique par un ophtalmologiste. Au regard de notre pratique, ce questionnaire facile à utiliser pour les médecins pourrait se substituer à la deuxième partie du Compte rendu type pour un bilan ophtalmologique du CERFA N° 13878 utilisé par les MDPH mais très complexe pour le corps médical.